22 octobre 2017

Une semaine de Wwoofing à Sasayama chez Chosan

Entrée du temple Daisen-in à Kyoto
Bonjour tout le monde,

Quand nous avons commencé à réfléchir à notre projet de voyage, il a tout de suite été clair pour tous les deux que nous ne nous limiterions pas au tourisme. Notre envie de voyager était aussi et surtout liée au désir de découvrir d’autres façons de vivre et d’apprendre à relativiser la manière dont nous voyons le monde en Belgique, notre rapport au temps, notre rapport aux autres, notre culture, etc. Nous avions envie de partager le quotidien de familles dans les pays traversés, de nous éloigner de notre vie citadine bruxelloise, de faire quelque chose de différent de nos
métiers habituels. Le wwoofing, qui consiste à travailler dans une ferme bio en échange de la nourriture et du logement, nous semblait le moyen idéal pour réaliser tout ça.

C’est ainsi que nous avons posé nos sacs pour une semaine dans le village de Sasayama, à proximité de Kyoto, où nous avons rencontré Chosan qui nous a accueillis chez lui.


Chosan est un japonais de septante-et-un ans qui a vécu la plus grande partie de sa vie en ville, en tant que chercheur dans un laboratoire pharmaceutique, à développer un médicament pour diminuer le cholestérol. Il nous a expliqué avoir subi un gros coup quand des études médicales ont prouvé que le cholestérol était en fait – sur le long terme – bon pour la santé. Ça a été un choc pour lui et ses collègues et lui a fait remettre sa carrière en question. À cinquante ans, il a fini par démissionner, quitter la ville, emménager à la campagne et se lancer dans la culture de fruits et légumes biologiques. En effet, pour lui, la santé ne dépend pas des médicaments – il nous a d’ailleurs affirmé que la grosse majorité d’entre eux ne servait à rien, si ce n’est à enrichir les firmes pharmaceutiques – mais de la nourriture.

La ferme de Chosan est en réalité un grand potager cultivé par un passionné d’agriculture naturelle. Il y cultive riz, céréales, légumineuses et légumes. Il ne vend pas ses légumes, la récolte n’est pas suffisante, et il travaille seul dans son petit champ, avec l’aide ponctuelle d’amis et de wwoofers. Il nous fait visiter la petite maison en bois qui jouxte la maison où il vit avec sa femme et ses trois enfants. La maisonnette comprend une chambre, une cuisine et une salle-de-bain et a été construite par Chosan avec l’aide de wwoofers. Le paradis pour nous qui sommes dorénavant habitués aux petites chambres et aux salles de bains communes. Ici, nous avons toute une maison pour nous deux ! :-)


L’organisation des journées est claire et précise : à 8h30, Chosan vient nous chercher et nous emmène au champ auquel nous nous rendons à vélo. On travaille jusque 11h30, on rentre cuisiner le repas du midi, puis on recommence à travailler de 13h à 16h. À 11h30 et à 16h, une alarme retentit dans la vallée pour prévenir les agriculteurs environnants que l’heure de la pause a sonné (la première fois, j’ai cru avoir fait un bond dans le temps vers la seconde guerre mondiale et entendre les sirènes prévenant l’arrivée d’avions prêts à lâcher leurs bombes). Mais Chosan est adepte de la « slow life » et nous prévient tout de suite que nous ne devons pas nous presser en travaillant. Il nous arrive d’ailleurs fréquemment de terminer le travail une demi-heure plus tôt que prévu, quand il considère que le boulot abattu est suffisant pour la journée.


Nous sommes arrivés en pleine période de récolte des haricots noirs. Pour le moment, ils sont encore verts (et déjà délicieux, on peut les manger verts et si on attend ils deviendront noirs). On taille les arbustes, on coupe leurs feuilles, on détache les haricots. Pour les manger, il faut encore les cuire et les écosser. La quantité d’heures de travail nécessaire pour en obtenir une petite casserole est invraisemblable. Il faut dire que tout le travail est réalisé à la main, sans les machines sans doute utilisées pour une production plus industrielle. Une chose est sûre : le prix auquel on paie nos légumes nous paraît complètement dérisoire comparé au travail nécessaire à la plantation et à la récolte. De quoi remettre les choses à leur place !

À part les haricots, le reste de notre travail constituera à débroussailler les alentours du champ envahis par les arbustes et la broussaille. Cette partie-là est plus physique, on sue, surtout les premiers jours où on travaille par trente degrés (on sera bientôt rattrapés par les typhons et par la pluie et à l’heure où je vous écris, ça fait une bonne douzaine de jours qu’on n’a plus vu le soleil ! Jamais plus je ne dirai qu’il pleut beaucoup en Belgique ! 😉). La faune japonaise est différente de la faune belge : on observe des serpents, des mille-pattes géants, des écrevisses, des crabes et des grenouilles par dizaines. Il paraît qu’il y a des singes, aussi, mais on n’en voit pas.

Cette première expérience de wwoofing est un vrai bonheur, on y trouve bien plus que ce qu’on était venus y chercher. On passe énormément de temps avec Chosan. Chaque midi, il nous cuisine un repas japonais, chaque soir il nous rejoint dans notre maisonnette de bois avec une bouteille de saké, de bière ou autre alcool japonais et nous cuisine un autre repas japonais. On y goûtera plein de plats plus délicieux les uns que les autres, dont les fabuleux okonomyiakis que Chosan nous prépare avec talent et qu’on n’est pas prêts d’oublier ! Durant deux jours, on se prête au jeu de lui faire découvrir des repas « belges ». Chosan nous parle de lui, de sa vie, du Japon. S’il accueille des wwoofeurs, ce n’est pas seulement pour obtenir de l’aide, c’est aussi et surtout pour faire des rencontres, découvrir d’autres cultures, entendre les histoires des gens qu’il accueille chez lui (Chosan fait partie du petit pourcentage des japonais qui parlent très bien anglais). Il nous apprend à dire « Itadakimaas » et « Gotchissosamadesta » en joignant les mains et en penchant la tête avant et après le repas. Il nous emmène à son cours de yoga où nous discutons avec la prof et l’autre élève autour d’une tasse de thé japonais après le cours. Il nous présente Tcheko qui vient nous aider à récolter les haricots. Il nous emmène à un onsen proche de chez lui (les onsen sont célèbres au Japon, on en trouve partout, il s’agit de sorte de spa dont l’eau provient de sources d’eau chaude naturelles de ce pays volcanique). Nous nous baignons dans de l’eau très chaude, aux teintes diverses en fonction de ce qui y a été ajouté (pétales de fleur par exemple). Certains bains sont d’ailleurs très faiblement radioactifs, il paraît que c’est bon pour la santé, mais nous on préfère éviter ! Il nous a proposé de nous joindre à une méditation zen qui a malheureusement été annulée. Il nous fait visiter le sanctuaire shinto du village et nous montre comment y prier.

Chosan roule un maki

Les fameux okonomiyakis

Au tour de François de préparer un okonomiyaki
Inutile de vous dire qu’on est ravis de cette expérience 😊 Quand arrive le moment de se dire au revoir sur le quai de la gare, Chosan nous serre dans ses bras et puis s’enfuit, au comble de l’émotion. C’est étrange de passer tant de temps avec quelqu’un et puis de s’en aller pour sans doute ne plus jamais le revoir. On est heureux, on est tristes, ce genre d’expérience fait partie du voyage. Ce qui est sûr, c’est que Chosan nous manque déjà, et qu’on a passé une merveilleuse semaine en sa compagnie !

Depuis, nous sommes retournés à Kyoto où nous essuyons notre deuxième typhon d’affilée. Du typhon, on ne voit pas grand-chose, si ce n’est de la pluie, de la pluie et encore de la pluie. De Kyoto et sa région, du coup, on voit principalement les murs de notre chambre et ceux des cafés où on se réfugie. On est un peu tristes, un peu résignés, on ne peut pas y faire grand-chose. On sort parfois sous la pluie, parfois on attend qu’elle cesse, on arrive à visiter quelques temples par-ci par-là. On lit, on écrit, on décide de quitter le Japon un peu plus tôt que prévu, directement après nos deux prochaines semaines de wwoofing qui commenceront début novembre. Et entre les deux, on passera par Hiroshima, la petite île paradisiaque (paraît-il) de Miyajima, puis on remontera vers Tokyo et on passera nos derniers jours de non wwoofing à Kanazawa. Et bonne nouvelle : après le typhon, la météo prévoit (enfin) du soleil !!! 😊

À bientôt pour la suite de nos aventures !

Sophie

Le Pavillon d'or à Kyoto


Kyoto

Touristes en kimono à Kyoto

Kyoto

Il pleut à Kyoto


Forêt de bambous à Kyoto


Jardins du temple Tenryu-ji


Temple Fushimi-Inar


2 commentaires: